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Après Covid-19, rééquilibrer l’espace public !
La période de confinement que nous vivons aujourd’hui, liée à la crise sanitaire du COVID-19, prouve à quel point les espaces publics peuvent être vécus différemment selon les possibilités qu’on nous donne, qu’on se donne, d’en faire usage.
Elle voit également fleurir de nouveaux espaces publics temporaires, par le réaménagement de certaines zones en vue de répondre à deux besoins : continuer à pouvoir sortir de chez soi tout en garantissant la distanciation sociale nécessaire. Permettre un accès « sécurisé » à l’espace public, bien commun par excellence, est en effet indispensable. Il l’est encore davantage pour les ménages habitant dans des zones densément bâties dans de petits logements ou pour les ménages en situation de « mal-logement », … devenant alors un prolongement de leur habitation, voire une véritable « bulle d’air » pour échapper à des conditions vie compliquées.
Ainsi la Commune d’Ixelles a réorganisé les espaces voués aux piétons et cyclistes autour des étangs d’Ixelles pour leur donner davantage d’espace, a créé des “zones résidentielles” ou “zones de rencontres” où les rues deviennent un espace partagé (limitation de la vitesse pour les voitures à 20km/h et circulation prioritaire des piétons et cyclistes sur l’intégralité de la voirie), ce qui permet à tous les usagers de se déplacer en respectant la distanciation sociale.
Etterbeek a aussi répondu à l’appel de la Région visant à mettre en place temporairement des “zones de rencontres” sur son territoire en aménageant les voies latérales de l’Avenue de Tervuren, le pourtour du Cinquantenaire, les voies latérales du Boulevard Saint-Michel et de l’Avenue des Casernes.
Et certains grands axes de ces communes vont se voir dotés de pistes cyclables qui devraient aider à désengorger les transports publics pendant le déconfinement. Pour avoir une idée de l’ensemble des grands axes réaménagés pour favoriser les pistes cyclables vous pouvez consulter le site de Bruxelles Mobilité.
Si nous saluons ces premières démarches, elles restent cependant trop timides et sur une portion de territoire trop réduite que pour répondre aux besoins réels, actuels et à venir, de la population face aux espaces publics. Ces lieux d’espace social sont vécus par chaque citoyen de chaque quartier, et la fin du confinement va marquer un retour à l’espace public comme nous ne l’avons jamais connu. Il va s’agir pour les usagers de le redécouvrir et de se le réapproprier, et très certainement, pour les autorités, de le « rééquilibrer ».
C’est d’ailleurs ce que prévoit à terme le Plan régional de Mobilité Good Move en accordant plus de places aux piétons et aux cyclistes en vue d’ « apaiser » les quartiers. Il serait par exemple judicieux d’utiliser ce plan dès aujourd’hui comme le fait par exemple la Commune d’Anderlecht, pour mettre en place dès maintenant des mesures ambitieuses pour transformer la ville, ses espaces publics et sa mobilité.
Concernant ces espaces publics, les pratiques sociales et urbaines sont aujourd’hui trop marquées par un système politique de démocratie représentative qui ne tient pas en compte une grande partie de la population isolée, souvent précarisée, pour qui il est difficile de se faire entendre.
La nécessité actuelle d’avoir une transition vers un système plus résilient, équilibré et social passe aussi par cette réappropriation de l’espace public, commun à tous, lieu de vie et de rencontres et d’échanges, de sociabilité. Ces aspects auront, par ailleurs, marqué nombre de citoyens confinés dans des conditions parfois extrêmes que ce soit en termes matériel (logements insalubres, etc.) ou psychologique (comme la solitude pour les personnes isolées, les violences intrafamiliales pour certaines familles, etc.).
Nous pensons par ailleurs que cette transition ne peut se faire aujourd’hui sans l’avis, et surtout la participation des citoyens, acteurs principaux de la vie dans ces espaces publics.
Dès lors, nous espérons et invitons les pouvoirs publics locaux à mener ce travail de rééquilibrage de l’espace public en impliquant au maximum l’ensemble de la population, y compris les habitants et usagers réguliers des espaces publics ixellois et etterbeekois ayant peu accès aux dynamiques de participation actuelles de par leur situation isolée, précaire, marginale, etc., afin de leur permettre aussi de s’exprimer, réfléchir et proposer des pistes pour repenser cet espace de vie dont ils sont les principaux acteurs.
Pour aller plus loin :
- La Libre : “Reclaim the streets : au temps du coronavirus, l’espace public comme bien commun” ;
- L’Echo : “Comment le coronavirus va impacter l’urbanisme et les transports” ;
- Le Soir : Carte blanche “Reconstruire la ville par le bas” d’Eric Corijn ;
- Article du Gracq, sur la question d’utilisation du plan Good Move : “Des zones résidentielles dans tous les quartiers de Bruxelles“.
Contact : Conseil en Développement Local d’Habitat & Rénovation – participation@habitatetrenovation.be – 0491/64 96 02.